Le port du masque chez les adultes : vers une régression du potentiel du cerveau humain?

Dans un texte paru en mars dernier signé par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, des psychologues alarment sur les conséquences du port du masque chez les adultes qui prennent soin des jeunes enfants quotidiennement.

 

Depuis maintenant plus d’un an, les jeunes enfants ne connaissent que cet environnement sanitaire : distanciation, lavage des mains, visages masqués et climat anxiogène. Ils observent des adultes à demi-visage. Ils entendent leur voix étouffée par le masque. Ils ont peu de contacts sociaux. Ils ont peu de contacts physiques. Ils vivent dans un climat anxiogène empli d’interdits. Leur développement social, émotionnel et cognitif est brimé et conséquemment, altéré. Dans la vie d’un jeune enfant, 1 an est une éternité. Certains ne se souviennent plus de la vie d’avant la pandémie. D’autres ne connaissent que cela. Un temps immensément grand qui laisse place déjà à de lourdes conséquences développementales visibles et qui prendront des années à palier.

Le cerveau humain est construit pour être en relation intime avec les autres. L’être humain est un mammifère grégaire qui vit en interdépendance avec ceux qui l’entourent. C’est une nécessité biologique.

La faculté d’empathie est innée à notre espèce. C’est-à-dire que notre cerveau contient déjà tout le bagage génétique pour ressentir de l’empathie envers autrui. Par contre, pour développer cette compétence au fil des années, le petit d’Homme a besoin d’un environnement qui sera favorable au déploiement de cette faculté comme pour toutes autres compétences relationnelles. L’être humaine naît avec un cerveau très immature. Le cerveau des tout-petits est très fragile et vulnérable au stress. L’environnement dans lequel il évolue a un impact majeur sur le bon développement de son cerveau.

Déjà, nous avions des données en juin 2020 d’une étude réalisée par une équipe chinoise de la pandémie de SRAS de 2003 portant sur le développement de 15 000 enfants âgés de 0 à 15 ans[1]. Les retards langagiers, moteurs et sociaux sont notables. Une réduction des courbes de poids particulièrement chez les jeunes enfants de moins de 4 ans a été observée. Les causes étaient les changements de comportement (port de masque, quarantaines et activités extérieure réduite) qui peuvent affecter les fonctions physiologiques et psychosociales des enfants. Les masques nuisent à la communication non verbale entre les enfants et les adultes et affaiblissent les liens sociaux et cognitifs.

En janvier 2021, l’Université de Grenoble donne les résultats d’une enquête réalisée auprès de 600 professionnels de la petite enfance sur les effets du port du masque et des nouvelles modalités d’accueil des enfants. Il en ressort que les interactions langagières sont plus pauvres. Le port du masque a des conséquences sur l’acquisition du langage. Cela est particulièrement remarqué chez les mois de 18 mois ; ils ne parviennent pas à saisir les paroles et se désintéressent de ce qui leur est dit. Nombreux professionnels ont noté des attitudes socioaffectives altérées : pleurs, anxiété, tentatives de retirer le masque de l’adulte ou au contraire, des réactions de peur face au visage démasqué et des difficultés à déclencher le sourire réponse. Les professionnels déplorent également les conditions de travail délabrés : fatigue liée à l’altération de la respiration, nécessité de hausser le ton pour se faire entendre, surcharge de travail pour s’adapter aux mesures d’hygiène, renoncement à certaines activités.

L’environnement dans lequel évolue un enfant favorise ou non son développement affectif, social et cognitif. Les relations affectives et sociales sont au cœur du développement du cerveau humain. Des connexions cérébrales cognitives et sociales affaiblies étaient remarquées chez les enfants observés lors de l’épidémie en 2003. Qu’en sera-t-il pour cette pandémie mondiale? Des connexions s’affaiblissent déjà petit à petit. Les connexions neuronales et les circuits subjacents ne peuvent pas pleinement se déployer dans un environnement anxiogène ni en l’absence de contacts physiques et de chaleur humaine. L’être humain a besoin de voir le visage entier pour développer pleinement ses compétences socio-émotionnelles et cognitive. Le cerveau des enfants sera-t-il gravement entravé? Verrons-nous des enfants avec un cortex préfrontal plus petit car moins de neurones et de circuits neuronaux se seront créés? Reconnaîtrons-nous toutes ces régressions dans le développement du cerveau humain comme étant la conséquence directe de ces mesures sanitaires? Ou, préfèrerons-nous nous esquiver de notre responsabilité en diagnostiquant massivement des troubles neurologiques et psychologiques chez la prochaine génération? Cette porte est déjà pleinement ouverte…

Les jeunes s’adaptent-ils? Font-ils preuve de résilience? Les enfants ont la faculté de se résigner afin de poursuivre leur développement en toutes circonstances. C’est l’instinct de survie qui prédomine. À cela ne tienne, le coût à payer quant à leur développement affectif, social et cognitif est énorme. La détresse et la souffrance engendrée n’est pas moindre.

Les conséquences des mesures sanitaires sur le développement affectif, social et cognitif des enfants sont graves et spécifiques. Nombreuses études s’entendent pour dire que les enfants transmettent peu la Covid aux adultes – ce sont les adultes qui contaminent les enfants et les enfants sont très peu à risque de formes graves[2]. Tout un chacun a droit de travailler dans un milieu sécuritaire. Les enfants, notre avenir, ont également droit à ce que l’environnement dans lequel ils croissent soit sécuritaire affectivement et physiquement. Ils ont le droit d’être entourés d’adultes qui prennent soin d’eux et veillent au bon développement de toutes leurs facultés affectives, sociales et cognitives. Les enfants sont des êtres dépendants, fragiles et vulnérables et nous avons ce devoir en tant qu’adultes de veiller à leur épanouissement.

 

Mélanie Ouimet

 


Références:

[1] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.05.12.20099945v1

[2] https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/AvisRapportsDomaine?clefr=911

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Shares